Interview : « Notre ambition est de disrupter le marché des LGO en Europe »

25/10/2023
Hélène Charrondière
Hélène Charrondière
Fondatrice et dirigeante de Health Analytica
Arrivé en France fin 2022, Pharmony bouleverse le marché des LGO avec une solution en mode SaaS. Sa promesse : proposer aux pharmaciens un logiciel simple d’utilisation, plus économique et facilitant la transformation numérique de l’officine. Interview de son président, Daniel Israel.
Votre société est arrivée sur le marché français il y a moins d’un an. Pouvez-vous nous brosser son portrait en quelques lignes ?

Daniel ISRAEL : Pharmony est une SSII créée en 2015 au Luxembourg, détenue majoritairement par DM Invest. Nous sommes des entrepreneurs qui avons plus de 20 ans d’expérience dans les nouvelles technologies médicales et la santé numérique. Nous sommes aussi actionnaires de Sivan Innovation, une pépite de la Heath Tech spécialisée dans les thérapies numériques. Investir dans les innovations de rupture est dans notre ADN !

Votre promesse est de disrupter le marché des LGO. Quels sont vos atouts pour y parvenir ?

D.I. : nous arrivons sur le marché européen avec le premier LGO en mode SaaS, une technologie qui est devenue le standard informatique des entreprises et la norme dans le monde du retail, mais dont l’adoption par le circuit officinal est très retard. Pourtant, ses avantages pour les pharmaciens sont nombreux. Sur le plan financier, le mode cloud réduit significativement le budget informatique grâce à la suppression du serveur local et à l’automatisation de la maintenance. Sur le plan fonctionnel, outre un déploiement plus rapide, la technologie cloud permet à l’officine de se connecter facilement à une multitude de solutions numériques tierces : gestion des processus métier, applications de services pharmaceutiques, plates-formes d’achats et de vente en ligne… Il s’agit, par ailleurs, d’une solution plus sécuritaire dans la mesure où elle permet l’enregistrement et l’archivage automatique des données sur un serveur sécurisé et délocalisé en mode HDS. Enfin, elle simplifie la gestion quotidienne de l’officine : les membres de l’équipe peuvent se connecter à distance et échanger plus facilement entre eux.

Les pharmaciens sont-ils aujourd’hui prêts à opérer ce changement ?

D.I. : je le pense. Nous sommes d’ailleurs satisfaits du rythme de déploiement de notre solution, compte tenu de l’environnement. Il ne faut pas oublier que les acteurs historiques proposent des logiciels clients lourds (avec des serveurs en local), la location/vente de matériel et équipements informatiques, et que les contrats sont engageants (en général près de 48 mois) et parfois très verrouillés. Pour les pharmaciens, ce modèle induit des coûts d’installation et de maintenance plus élevés qu’avec une solution cloud. Dès lors, on comprend que ces acteurs n’aient pas d’intérêt à faire radicalement évoluer leur solution et basculer en mode SaaS…

ʺ Agilité, connectivité, sécurité : la technologie cloud va accélérer la transformation numérique de l’officine. ʺ

Daniel Israel

Quand avez-vous démarré la commercialisation de votre logiciel ?

D.I. : en 2017, année au cours de laquelle nous avons lancé Pharmony One sur le marché belge. La Belgique, qui compte environ 4 500 pharmacies, est certes un marché de taille modeste, mais cette première phase a été riche d’enseignements, car sur le plan fonctionnel et organisationnel, les officines belges sont plus matures que dans bon nombre de pays européens. La PDA y est plus développée, la sérialisation a été déployée plus tôt et la robotisation y est très avancée. Le déploiement réussi de Pharmony One auprès de plusieurs centaines d’officines belges a été une sorte de « POC » (preuve de concept), qui nous a permis de bien appréhender les process métiers et les besoins des pharmaciens en termes de fonctionnalités.

Après la Belgique, vous avez mis le cap sur la France.

D.I. : le marché français offre des perspectives importantes, étant donné les besoins actuels des pharmaciens et le retard dans l’adoption de solutions cloud. Nous avons préparé notre arrivée avec un premier partenariat stratégique établi avec le groupement Giphar, qui nous a permis de déployer notre solution dans une première officine de ce réseau, la Pharmacie de la Place Picard à Bordeaux. Au cours des derniers mois, nous avons poursuivi notre déploiement auprès d’autres pharmacies Giphar et entamé des discussions avec une dizaine d’autres groupements. Nous avons d’ores et déjà signé un contrat de partenariat avec la nouvelle enseigne Act Pharmacie. Je précise que sur le plan technique, Pharmony One est évidemment agréé Sesam-Vitale, nos serveurs sont certifiés HDS et le référencement Ségur 1 est prévu pour octobre 2023.

Interface Pharmony One
Interface de Pharmony One

En quoi les partenariats avec les groupements sont-ils importants pour vous ?

D.I. : même si les pharmaciens restent libres de choisir leurs solutions informatiques, il est clair qu’être référencé auprès d’un réseau constitue un levier efficace pour déployer plus rapidement notre solution. Par ce référencement, nous apportons une caution supplémentaire et rassurons les pharmaciens sur la performance de notre logiciel. De plus, le mode SaaS répond au besoin d’échanges entre les membres d’un réseau, il trouve donc naturellement sa place dans un groupement ou une enseigne de pharmacies.

Outre les officines affiliées à ces réseaux, ciblez-vous un profil type de pharmacie ?

D.I. : nous ciblons à vrai dire toutes les pharmacies, les petites, moyennes et grandes pharmacies, nous pensons que toutes les officines et les groupements ont intérêt, à terme, à passer en mode SaaS !

Pharmony One ne vient pas seul. Vous proposez aux pharmaciens d’autres solutions.

D.I. : en effet, nous avons développé Pharmony Companion, une application mobile multifonctions qui permet aux utilisateurs de Pharmony One d’accéder à leur espace, quel que soit l’endroit où ils se trouvent. Autre module développé : One Unit, totalement intégré à Pharmony One et qui permet de gérer la PDA, qu’elle soit robotisée ou manuelle. Enfin, nous proposons Pharmony Entrepôt, module de gestion d’entrepôt pour la gestion des commandes groupées, la refacturation aux officines tierces ou aux clients externes.

ʺ Déploiement de Mon Espace Santé, arrivée de la e-prescription, élargissement des services pharmaceutiques… Toutes ces évolutions vont considérablement augmenter les volumes de données traitées par les pharmacies. Les systèmes actuels, avec des serveurs en local, ne sont plus adaptés. ʺ

Daniel Israel

Vous avez annoncé ces derniers mois des accords avec plusieurs éditeurs de solutions numériques destinées à l’officine. Quels sont vos critères pour sélectionner vos partenaires et ouvrir des API ?

D.I. :  ceci est un point essentiel car il s’agit là d’un axe de différenciation majeur avec les éditeurs historiques. Nous souhaitons proposer un environnement ouvert qui s’inscrive dans la transformation numérique de la pharmacie, avec des solutions performantes répondant aux besoins des pharmaciens et des patients. Nous sommes donc très sélectifs ! A ce jour, nous avons ouvert notre plate-forme à six solutions : Thesorimed (base de données de médicaments), Medipim (banque médicamenteuse innovante), Bimedoc (gestion numérique des entretiens et des bilans pharmaceutiques), mesoigner.fr (plate-forme multiservices mettant en relation pharmaciens et patients), Icanopée (application de gestion du parcours de soins des patients) et Phealing (logiciel de sécurisation des ordonnances).

Vous avez évoqué les avantages économiques du mode SaaS. Concrètement, quel est le coût de votre solution pour un pharmacie ?

D.I. : notre offre est une des moins onéreuses du marché. En plus de frais d’installation, l’abonnement s’élève en moyenne à 400€ par mois selon la taille de la pharmacie, avec un abonnement « all-inclusive » qui comprend, au niveau logiciel, la gestion des commandes, des stocks et des délivrances, la recherche des produits, la gestion des INS, l’accès à l’annuaire RPPS, la comptabilité de l’officine, les échanges entres pharmaciens, l’app Companion, les bases médicamenteuses… Bref, c’est un LGO complet. La maintenance, les mises à jour, l’hébergement et la sauvegarde des données, les SMS et le support technique sont aussi inclus dans ce tarif. Notre offre couvre la partie logicielle et fonctionne sur des matériels standards, nous vendons très peu de matériel informatique.

Comment se passe concrètement la bascule vers Pharmony One ?

D.I. : nos experts techniques savent reprendre les données de tous les logiciels du marché dans des délais records, et les injecter dans Pharmony. Les process d’installation et de formation sont aujourd’hui parfaitement maîtrisés. Autre point important, notre contrat est sur une durée d’engagement d’un an, le pharmacien peut changer de solution quand il le souhaite. Cette liberté est un facteur important de différenciation par rapport à nos concurrents.  Nous ne verrouillons aucun pharmacien, la portabilité est une des composantes fondamentales du RGPD et du SEGUR. Nous sommes très attachés à la liberté de choix du pharmacien.

ʺ Sur ce marché, les lignes ne peuvent bouger que si un nouvel entrant arrive avec une offre suffisamment disruptive pour redistribuer les cartes. C’est ce que nous souhaitons faire. ʺ

Daniel Israel

Vous allez bientôt célébrer votre premier anniversaire sur le marché français. Quel bilan faites-vous de cette première année ?

D.I. : les retours des premiers utilisateurs sont excellents et de nouvelles pharmacies Giphar basculent vers Pharmony One tous les mois. Les barrières à l’entrée sont certes élevées car les pharmacies et les éditeurs historiques de LGO sont engagés dans des relations de longue date. Nous nous inscrivons dans une démarche commerciale de long terme car l’adoption d’une innovation relève d’un processus complexe et l’étape « preuve de concept » est clé. C’est la raison pour laquelle nous recrutons en priorité des formateurs pour accompagner les pharmaciens dans la prise en main du logiciel.

Pour finir, quelles sont les prochaines étapes pour le groupe Pharmony ?

D.I.  : la montée en puissance sur le marché français et l’ouverture de nouveaux marchés en Europe. Nous nous intéressons notamment au marché espagnol, dont la configuration concurrentielle et le potentiel commercial sont similaires à ceux de la France.

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